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Les tribulations de la famille Troll
13 mars 2021

"c'était mieux avant" Ah ouais vraiment ?

machine

(Machine à coudre de mon arrière grand mère *)

 

Cela fait maintenant quelques temps que je me documente ça et là sur l'autonomie : alimentaire, énergétique, la permaculture etc 
Sur la réappropriation de son quotidien et de ses choix de vie en fait.

Et régulièrement dans les divers témoignages, les vidéos etc, les intervenants font référence à "avant" :

Avant nos anciens avaient le savoir faire, avant nos anciens n'avaient pas peur de bosser dur à la ferme, avant les anciens étaient solidaire, ils s'occupaient de leur vieux et de leur famille, ils se passaient la ferme de génération en génération...

Ce à quoi je répondrais : premièrement c'était loin d'être le cas de tous (avant, certain n'avaient rien..) deuxièmement, avant ils n'avaient pas trop le choix.

Et quand ils ont eu le choix, ils se sont tous barrés en espérant de meilleurs conditions de vie, et ce n'est pas moi qui les blâmerais pour ça. 

En fait, c'est une sorte d'idéalisation du monde d'avant. Un "avant" que ceux qui l'évoquent à tout bout de champs n'ont pas connu. Parce qu'avant ce n'était pas mieux pour plein de personnes : les ouvriers qui n'avaient rien, les derniers de la fratrie qui n'hériteraient pas de la ferme, les enfants qu'on faisait bosser, les femmes.

ll y a peu c'était la journée internationale des droits des femmes. J'avais donc envi de parler du rôle tenu par les femmes à l'époque de ce "avant" phantasmé par une poignet de personne. Avant donc, non seulement les femmes participaient aux travaux de la ferme, mais en plus elle faisaient les repas, le ménage, la lessive et s'occupaient des mômes et des vieux. 

Et ce qui m'inquiète un peu avec ce discours du "c'était mieux avant", c'est que sous couvert de projet de vie en « autonomie », les femmes investies dans ces projets de couple ou de famille perdent des droits et du choix et se retrouvent (encore) à assumer beaucoup de charge mentale et de taches domestiques.

Il y a déjà des pseudo-mouvements de pensée qui se disent permaculteur de l'humain (ce qui ne veut rien dire..) et qui insidieusement suggèrent que chacun a une place définie, genre niche écologique, et étonnamment dans leur discours celle de la femme et très bien définie : "ferme la et retourne en cuisine".

En écrivant ce billet je me rend compte que ce risque de glissement est directement lié à notre statut social actuel. (on a pas le cul sorti des ronces quoi..)

Par exemple, nous, la famille troll.

Moi, mamatroll, j'ai un niveau d'étude DUT (bac+2) papatroll a un CAP, mais son expérience professionnelle fait qu'il a acquis des connaissances et un savoir faire équivalent à un BTS. On a donc grosso modo le même "niveau d'étude".

Même si je bossais à mon niveau d'étude mon salaire ne sera  jamais égal à celui de papatroll. J'ai une formation dans le social, lui dans le bâtiment. (Dans le social c'est bien connu on travail pour la cause pas pour l'argent.)
Avec les boulots auxquels je peux prétendre actuellement, on a calculé que si papatroll voulait prendre un jour par semaine pour s'occuper des enfants et de notre projet, je devrais bosser 2 jours pour compenser la perte de revenu.

Donc pour des raisons financières c'est moi qui reste à la maison pour la gestion du quotidien et de notre projet d'autonomie.

Ça lui pèse parce qu'il aimerait avoir plus de temps à consacrer à sa famille et à notre projet et ça me pèse de ne pas être autonome financièrement (je dépend de : l'aide de mes parents, des alloc', des revenus de mon conjoint et en dernier des revenus de mon atelier de couture dont je ne trouve pas le temps de m'occuper)

Notre différence de traitement  par la société actuelle nous oblige à faire ce « choix » alors que nous, nous aspirons à un vrai partage des taches et des sources de revenus. 

 

Tout ça pour dire que prôner le « c'était mieux avant » n'est pas forcément de bonne augure pour nous les femmes, et qu'il va falloir qu'on y fasse très attention.

 

Je pense qu'on est à un tournant important.

De plus en plus de monde s’intéressent aux modes de vie alternatifs, s'interrogent sur leur consommation, veulent se réapproprier leur quotidien, ralentir, choisir leur façon de vivre. Et ça, je trouve ça chouette. Mais cela ne doit pas se faire aux détriments des droits des femmes.
Aller vers plus d'autonomie c'est aussi bosser plus pour soit au quotidien, ça fait parti du package. Vous n’êtes plus dans un bureau à manger au self ou au resto. L'entretiens de votre outils de travail, de vos sanitaires, ce sera vous. Votre bouffe ce sera vous, tous les jours et ce sera d'autant plus chronophage si vous êtes nombreux. Et tout ça en plus de bosser à planter des patates et des navets pour parfois ne rien récolter de son travail. Il n'y a pas de raison que les femmes prennent plus en charge cette partie la de la vie en autonomie que les hommes.

Pour moi ce tournant, se sera l'occasion de mettre en place une nouvelle façon de partager l'organisation du quotidien sur un même pied d'égalité, parce qu'être autonome c'est du boulot. S'inspirer de ce qui se faisait « avant » pour notamment les savoir faire pourquoi pas, mais un retour en arrière avec des femmes corvéables à volonté non merci.

 

Bonus

Des chaines youtube perma / autonomie et assimilées, animées par des femmes :

 

Vénus, ma vie hors réseau

La p'tite ortie dans la prairie

Le jardin d'Alekil

 

Le documentaire "nous paysan" de France 2 contient des entretiens de paysannes. (nottons qu'à aucun moment dans le résumé du documentaire on ne parle des paysannes...)

 

Nous paysans

 

 

* la petite histoire de la machine à coudre et d'une partie de ma famille.

Il parrait que c'est mon arrière arrière grand père qui a offert cette machine à coudre a sa fille, pour qu'elle puisse bosser et se faire un peu d'argent le temps de se marier. (ou rapporter de l'argent à la famille ?) Ensuite elle s'est mariée et s'est installée dans la ferme de son mari, elle a eu 3 filles et 1 garçon. Le garçon a hérité de la ferme, ma grand mère née pendant la première guerre a eu la chance d'avoir une bourse pour faire des études, elle est devenue institutrice et s'est mariée. Elle a eu 4 garçons (et quelques fausses couches) Une de ses soeurs s'est mariée, l'autre, plus simplette, est restée à la ferme avec son frère. La ferme c'était : 2 chambres une pièce principale, un grenier et des ddépendances, un seul robinet d'eau froide à l'évier et un puit, un tableau electrique vétuste, pas de sanitaire (on faisait dans la rigole sous la pente du toit et on attenait la pluie) pas de chauffage, juste un cantou. C'était ça la ferme "avant".
Edit :
Je partage le témoignage de mon père qui a tenu à ajouter des précisions :
Une petite modif. Le robinet d'eau froide a la souillarde de ton arrière grand mère a été installé quand son fil ( celui qui a hérité de la ferme ) a pris sa retraite dans les années 70-80. Avant on tirait l'eau du puits avec un seau attaché a 15 m de chaine , enroulée sur un gros cylindre de bois que l'on faisait tourner a l'aide de quartes tourillons en bois assemblés dans le cylindre. Une lessive de linge ( environ une par moi ) durait un jour. Le matin les linge était bouillit sur le feu dans la lessiveuse, après le repas quant le vaisselle était terminée , , il était mis dans deux brouettes , pour être descendu au fond du bois en contrebas , ou il était battu et rincé dans un grande marre d'eau de source. L'eau du puits était réservé pour la cuisine, les gens buvaient du vin. l'eau du puits était surtout utilisée pour abreuver le bétail . Huit vaches , trois ou quartes veaux , des cochons, inutile de préciser le nombres de seaux puisés dans la journée .De nos jour Il me paraît difficile de se passer de la machine a laver, de la pompe a eau, du réfrigérateur , du congélateur. A cette ferme le pain était cuit dans le four tous les quinze jour, cela durait deux jours, la veille pour préparer la pâte, et prés chauffer le four, et le lendemain matin, pour chauffer le four a blanc , laisser tomber la chaleur de la voute réfractaire, et enfourner avant manger a midi. Je prend soin de préciser les durées et les fréquences de tous ce qu'ils exécutaient jour après jours, pour mettre l'accent sur le différentiel des rythmes journaliers "d'avant , et de maintenant" Un lessive durait un jour entier , maintenant elle dure 1h30 max en regardant tourner la machine ( c'est ce que j'ai fait quand ma mère a eu sa première machine a laver ) Pour la petite histoire , Avant quand les vieux n'avaient pas de pension de retraite, on les confinait au coin du feu assis dans la "cantou " . Curieusement, le taux d'accident de vieux tombés dans le feu a considérablement diminué, quand ils ont touché une pension. Faut préciser que dans la plupart des foyers , c'est le vieux qui avait accumulé le plus "d'oseille " .

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